A wolf never runs alone. Ft Jägerin&LoupG *flashback*

Novembre 2001, quelque part près d’Hambourg.


Loup-Garry avait 13 ans.
Jägerin, elle, en avait 14.
C’était par une journée pluvieuse que tout avait changé.
Par une nuit pluvieuse qu’ils avaient pris leur envol.

‘’Oh ! La chinoise, tu veux goûter mon riz ?’’ S’exclama un de ces idiots plus âgés de l’orphelinat, un de ceux qui partent bientôt.

Ni Jägerin ni Garry ne bronchèrent, trop occupés à nettoyer le sol de la cafétéria. Ces deux-là étaient inséparables.
Depuis qu’il avait été placé en internat, Loup-Garry avait toujours eu cette attitude mélancolique mélangé à une impression de supériorité qu’il assumait chaque jour un peu plus. C’est pour cela que tous les enfants s’étaient éloignés de lui dès son arrivée. Tous sauf Jägerin. Elle, Loup-Garry le fascinait. Elle avait pris du temps à l’apprivoiser, et vice-versa pour qu’ils commencent à se dévoiler l’un à l’autre, pour que lui commence à lui raconter son enfance dorée, digne de contes de fées et elle ses envies de meurtres et de vengeance.

Loup-Garry était arrivé il y a presque deux ans dans cet orphelinat, l’ancien ayant fermé. Un peu après Jägerin, qui faisait partie *à contre coeur* de son comité d’accueil.
Depuis, ils n’avaient cessé de ne compter que sur eux-même. Les autres de l’internat n’étaient que des idiots, des cas sociaux en manque d’affection et aux hormones en surexcitation. Eux, ils valaient tellement mieux que ça.
Loup-garry avait même inculpé cette notion à son amie, et si l’un d’eux en doutaient ne serait-ce qu’un court instant, le russe sortait de sous son pull le long collier ou pendant encre et toujours la chevalière de son père, promesse silencieuse et métallique d’un avenir meilleur.

Et cet avenir meilleur arrivait à grands pas.

Le grand con de tout à l’heure alla enfin rejoindre ses amis. Il n'y avait plus que Jägerin, Loup-Garry et un surveillant à l’autre bout de la pièce.
Le russe leva ses yeux pour croiser ceux de son amie. Ils étaient laids. Sous la pâleur des néons grisâtres, avec leurs vêtements d’écoliers si usés.
Tout ça allait bientôt changer.

‘’À toi de jouer, mein Engel…''chuchota t-il avec un sourire.

C’était tout ou rien.

"À toi de jouer, mein Engel..."
Jägerin sursauta en relevant la tête. Son ami ne l'avait pas habitué à de tels surnoms. Mais elle savait ce que signifiait celui-ci: elle allait devoir agir. Depuis des mois ils planifiaient leur fuite, loin de tout ces porcs crétins qui ne valaient rien. Les liens qui les unissaient leurs donnaient la force de continuer coûte que coûte ensemble.
Loup-Garry, après un dernier regard entendu, recommença à frotter le sol comme si de rien n'était, afin de ne pas éveiller les soupçons.
Un frisson d'adrénaline la parcourut des pieds à la tête.
Maintenant, elle savait exactement ce qu'il fallait faire. Le surveillant gardait un trousseau de clés à sa ceinture. Il suffisait qu'il s'approche suffisamment pour qu'elle puisse les dérober discrètement.

La jeune fille se leva prestement en faisant mine d'aller chercher un autre seau d'eau au bout du réfectoire, et feignit une lourde chute. Elle sera les dents en sentant son épaule heurter le sol froid, mais elle entendit également le surveillant s'approcher d'elle rapidement. Il la saisit par le bras pour la relever, et Jägerin put sentir son odeur fétide derrière elle. Elle s'appuya sur le surveillant en prétextant s'être foulé la cheville, et réussit à attraper le trousseau de clé qui pendait à la ceinture de ce dernier. Elle boitilla jusqu'à Garry en dissimulant les clés sous son vieux gilet, un sourire victorieux aux lèvres.
Garry avait finit la corvée pendant ce temps et l'attendait près de la porte du réfectoire avec un air satisfait, et son regard à cet instant suffisait à combler toutes ses peines.

Dès qu’ils furent sortis du réfectoire, les deux amis eurent beaucoup de mal contenir leur joie. Loup-Garry fit plusieurs fois tournoyer le trousseau avant de la redonner à Jägerin afin qu’elle le cache dans un de ses souliers. Les garçons ayant l’habitude de trouver du tabac, ils étaient fouillés quasiment tous les jours ; et même si les filles avaient elles aussi droit à des inspections régulières, ça n’irait jamais jusqu’à regarder dans ses chaussures.
Sortis du bâtiment B, ils traversèrent rapidement la cour afin de retourner dans leurs dortoirs respectifs, tandis que le ciel se couvrait peu à peu.

‘’Bon, la première partie du plan s’est déroulé sans accrocs, bien joué mein kätzchen. Ce soir c’est moi qui fait les réserves de nourriture (à tour de rôle, ils trouvaient le moyen de prendre la nourriture qui pouvait se conserver, au cas où), après on se retrouve derrière le bosquet à 22h. Tu as ta montre ? Bien. On récupère de l’argent et le pistolet dans le bureau de la directiveet on se casse a tout jamais. Compris ?’'
Jägerin ne lui répondit même pas qu’ils se séparaient déjà. D’habitude, lorsqu’ils devaient se quitter, ils partaient l’esprit lourd de tristesse, pendant à tous les autres cons qu’ils devraient affronter seuls. Mais cette fois-ci, non. Ils avaient trop de choses auxquelles penser, auxquelles rêver…

Jägerin quitta Loup-Garry plus heureuse que jamais. Ils avaient enfin la clé de la délivrance. Le reste, voler de l'argent restait assez facile. Jägerin mangea rapidement, sans jeter un coup d'œil aux autres pensionnaires blondes qui la regardait d'un air vaguement dégoûté. Elle regarda par-dessus son épaule à la fin du repas, et vit Loup-Garry à l'autre bout du réfectoire, qui se levait sagement avec les autres garçons pour regagner les dortoirs. Elle sentait le poids des clés dans sa chaussure. Tout allait bien.

Une fois dans sa chambre, la jeune fille se déshabilla, et se glissa dans son lit en gardant ses vêtements sur le dossier d'une chaise. Sa camarade de chambre, une grosse fille un peu simplette, se mit au lit en même temps qu'elle et éteignit la lumière.

Jägerin se tournait et se retournait dans arrêt dans son lit. Elle se sentait aussi vivace qu'en plein jour et brûlait déjà de sortir de cet internat sinistre avec son meilleur ami, son unique appui dans cet univers invivable. Il lui avait donné de la nourriture quand elle en était privée pour son mauvais comportement, il lui avait donné l'espoir qu'elle était indispensable pour lui, elle qui avait toujours été indésirable et indésirée. Les matins où elle était enruhmée, punie, insultée, il parvenait à la remettre d'aplomb avec seulement un surnom... Et celui qui avait ce pouvoir, elle était prête à l'accompagner n'importe où.

À l'heure convenue, elle sortit de son lit, mot ses affaires, et sortit de la chambre sans un bruit. Le couloir était désert, la surveillante devait être en train de ronfler. À pas léger elle descendit les escaliers, arriva dans un autre couloir au rez-de-chaussée, et ouvrit une fenêtre qui donnait sur une petite cour intérieure. Là il y avait une rangée touffue de buissons et c'était le point de rencontre des deux fugitifs.
Loup-Garry l'attendait. Elle sortit les clés sans un mot, et le suivit dans l'aile des garçons en passant par une fenêtre semblable à la sienne. Les couloirs étaient identiques. Loup-Garry fit signe à son amie de le suivre et ils montèrent prudemment jusqu'au 3ème étage sans croiser un surveillant. Ils dormaient tous durant leur tour de garde...

Enfin ils arrivèrent devant le bureau de la directrice. Une femme austère et radine, qui traitait les enfants comme du bétail. La porte était fermée à clé, mais le trousseau qu'avait volé Jägerin se rendit utile. La pièce était sobre, et glacée. Un bureau trônait au centre.
Les clés jouèrent dans les serrures, et les voleurs tombèrent sur des liasses de billets cachés dans un double-fond ainsi qu'un pistolet. Les yeux brillants de convoitise, ils les fourrèrent dans leurs poches, Loup-Garry glissa le pistolet dans sa ceinture et ils sortirent prestement.

L'internat était toujours plongé dans le noir.
Cependant, avant de partir, Loup-Garry avait une dernière chose à faire...

Une fois fois de retour dans le dortoir, Loup-Garry était plus qu’impatient.
La pluie cognait violemment les fenêtres, et tous ses camarades se livraient à des jeux aussi dégoutants que stupides, preuve encore de leurs neurones manquants.
Garry, allongé, fixait obstinément le plafond, il essayait de rythmer ses pensées au son de la pluie.
Soudain, l’orage tonna et tous ces petits morveux foncèrent dans leurs lits, sous prétextes que les surveillants arriveraient bientôt.
C’était donc ça la musique de la Liberté ?

21H40.
Le coeur de Lg battait de plus en plus fort, mais les autres garçons ne dormaient toujours pas. Bande de petits fils de putes qu’ils étaient.

21H50.
Plus un bruit.
Parfait

21H52.
Loup-Garry se lève, et descend très lentement l’échelle métallique, pensant que le garçon du lit d’en bas dort.

21H53.
Il s’habille, sort en douce sont petit baluchon de l’armoire en bois qui lui était réservé. Alors qu’il ouvre la porte, il se rend compte que Finn, le ‘’leader’’ du groupe l’observe. Loup-Garry s’approche de lui, se penche près de son visage et l'embrasse fougueusement.
Il avait déjà remarqué le comportement du bavois dans les douches. Ce dernier baisse sa garde et répond au baiser. Le russe s’assoit sur le lit et met sa main près des parties de Finn. L’allemand attrapa Lg par les cheveux pour que sa bouche descende plus bas, mais d’un coup il tire l’oreiller qui soutenait la tête de Finn et le plaque contre son visage. Les ronflements d’un autre orphelin dissimulent les gémissements de ce gros con.

21H59.
Loup-Garry a compté. Il faut 4 minutes et 19 secondes pour étouffer un homme. C’est toujours bon à savoir. Il reprend sa fugue et sort de la chambre, tremblant légèrement. Les dortoirs des garçons sont au rez-de-chaussé, il n'a donc pas d’escaliers à prendre. Lorsqu’il sortit du bâtiment, il ne fit même pas attention à la pluie.

22H03.
Il arrive au bosquet, et aperçoit brièvement la silhouette de Jägerin grâce à un éclair déchirant le ciel.
Ils firent demi tour pour retourner dans le bâtiment réservés aux garçons. La semaine dernière, Loup-garry avait remarqué qu’un passage dérobé dans le couloir du premier étage conduisant aux douches permettait d’entrer discrètement dans le bâtiment administratif. C’était parfait.
Hop, porte, pognon, et flingue. Encore mieux.